Le dossier médical informatisé, une nouvelle carte d’identité ?

Le Monde 21 septembre 2004

Désolé, cher monsieur, mais, après examen de votre dossier médical, nous ne pouvons vous accorder de prêt bancaire. » Cette réponse, aujourd’hui, ne nous surprend plus. Le banquier ne va pas prendre le risque de prêter de l’argent à un citoyen susceptible de tomber malade ou atteint d’un handicap. Une santé aléatoire rend la vie professionnelle difficile et les remboursements incertains. Cette logique financière est, dans notre société, implacable ! Continuer la lecture de « Le dossier médical informatisé, une nouvelle carte d’identité ? »

Un prélude à la crise de l’hôpital

Le Monde août 2003

Si l’on juge de la qualité d’un navire et de la fiabilité de son équipage, non pas par temps calme, mais lors d’une tempête, on peut estimer que le navire « santé publique » va mal. Plusieurs milliers de morts en quelques jours. Une hécatombe ! Certes, on peut comme le capitaine-ministre accuser la nature, mais on peut également mettre en cause la qualité de la structure et la compétence de ceux qui la dirigent. Car la canicule a bon dos ! Bien sûr l’événement est unique, bien sûr il était imprévisible, mais il y a trois ans nous assistions à la tempête du siècle, aujourd’hui c’est un autre caprice météorologique, demain ce seront des inondations ou une épidémie. Gouverner c’est prévoir, y compris dans le domaine de la santé. Continuer la lecture de « Un prélude à la crise de l’hôpital »

Cruelles retrouvailles : Extraits

Denis Labayle
Editions Julliard (2002)
202 pages
18,10 euros

Prix du roman du Doubs 2002
Prix Littré 2003
Mention spéciale du jury au Prix du Télégramme de Brest 2003
Sélectionné pour le prix Synopsis 2003

Présentation complète de l’ouvrage

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Extraits

Pages 7 et 8 :
« La vie s’est présentée à moi comme une fausse aventure. Par son ascension ininterrompue, mon existence aurait pu servir d’exemple ou de preuve que la société permettait aux plus humbles d’accéder aux plus hautes responsabilités. Et j’aurais pu continuer cette ascension si je n’avais perçu qu’elle créait une faille toujours plus béante avec mes origines et que cette permission s’avérait factice. Aussi fut-ce de mon propre gré que j’y mis un terme. Aucun de mes collègues de faculté ne comprit que je puisse quitter l’université sans avoir tenté ma chance d’atteindre les sommets. J’en tirai la profonde fierté d’avoir choisi moi-même mon destin. Je ne sais si j’en garde aujourd’hui regrets ou rancœur mais, c’est indéniable, j’y ai gagné en liberté. Et puis j’étais devenu médecin et le voyage pour y parvenir m’avait moi-même surpris. Comment en étais-je arrivé là ? Comment le petit vacher, le bouseux, le pèquenot comme on m’appelait au lycée, avait-il pu larguer les amarres de la fatalité paysanne ? Comment avait-il pu naviguer entre la jalousie des voisins, les reproches du frère et les encouragements ambigus du père ? Pour déjouer leurs obstacles, je les avais tous quittés sans regret. Tout au moins c’est ce que je pensais… car il ne se passait pas un mois sans que je retourne « là-bas », au fond du Finistère, pour faire craquer la terre. J’avais toutefois l’impression d’avoir tracé ma vie comme les sillons des champs de mon père. Profonds et droits. J’aurais donc pu savourer longtemps cette situation qui avait fait de moi un parvenu mais voilà, je le revis, et ce jour-là, de nouveau, ma vie bascula. »

Pages 45 à 48 : la mort de la mère…
« Chacun se crée des rites. Lors de mes retours au pays, je consacrais ma première visite de la matinée au cimetière pour nettoyer la tombe de ma mère. Après avoir avalé mon café et rangé ma chambre, je courus vérifier que le vent ou un mauvais voisin n’avait pas emporté les fleurs posées sur sa dalle. Je tenais à ce que sa dernière demeure soit de loin la plus gaie. Je lui devais bien cela, elle qui n’avait connu que le sacrifice et la rigueur des pauvres gens. J’entretenais également la tombe de mon frère qu’on avait couché à ses côtés, mais je faisais vite, y consacrant juste le temps qu’impose la décence, de peur qu’en m’y attardant, se réveille en moi l’absurde culpabilité. J’étais le seul à remplir cette tâche funéraire, mon père refusant de céder à cette obligation sociale par crainte, j’en étais sûr, de s’effondrer de chagrin sur la pierre où gisait sa fidèle compagne. Ma mère était morte trois ans auparavant. Non pas de vieillesse ou de maladie, mais d’épuisement. Ni mon départ vers la capitale, ni le décès de mon frère n’avaient modifié son rythme de travail, sans doute pour ignorer l’absence. Elle se levait toujours tôt le matin, avant tout le monde, dès le premier cri des oies affamées, pour donner à manger aux bêtes et préparer le petit déjeuner. Elle n’avait pas reçu l’éducation qui rend l’éloquence facile. Elle me parlait par gestes et par regards. Lorsque je lui apportais, triomphant, l’un de mes succès scolaires, elle limitait son compliment. “ C’est bien, mon fils ” se contentait-elle de me dire avec un discret sourire qui traduisait sa satisfaction, et je lisais dans son regard, la fierté. Je savais que ce jour-là elle me confectionnerait un kouignaman moelleux à la saveur incomparable. Une fois, une seule, elle prit mes mains dans les siennes maladroitement et je crus qu’elle allait enfin exprimer ce que son cœur chérissait mais j’attendis… J’attendis un long moment et elle resta sans mot dire. L’expression des sentiments ne se façonnait pas à l’école française où elle avait passé, de toute façon, bien peu de temps. Elle m’apprit à tout économiser, mes habits, le pain, un bout de ficelle, les épluchures et même l’eau de la vaisselle pour le poulailler. Tout, y compris la parole, et c’est ainsi que le silence s’installa lentement entre nous avec l’âge et le temps. On la retrouva un jour étendue, raide, froide, près du clapier. Elle avait juste eu le temps de terminer sa tâche et de distribuer les graines avec les feuilles de choux. Les animaux habituellement si prompts à manifester leur joie et leur détresse l’avaient regardée silencieux, ingrats et rassasiés. Même notre chien toujours en éveil s’était curieusement contenté de rester à ses côtés, les yeux hagards, la langue pendante, poussant de petits cris plaintifs mais refusant d’y croire. C’est tard dans la soirée, quand s’installa la veillée funèbre, qu’il laissa éclater de longs sanglots. Il hurla toute la nuit contre la mort qui emportait sa maîtresse. Je dus pour le calmer l’emmener tôt le matin s’épuiser sur la lande. Il courait loin et revenait chaque fois vers moi avec dans le regard et la voix la même interrogation, pleine d’incompréhension. A force de caresses et de fausses explications, je finis par le calmer et à midi nous avons suivi ensemble le convoi de sa maîtresse en route pour son dernier voyage. Le seul qu’elle ait effectué car, depuis le jour de ses noces où mon père l’avait ramenée de Guerguelec, elle n’avait jamais eu assez d’argent pour quitter le village. Elle avait à cette époque tout juste dix-huit ans. Au village, elle savait tout des drames et des haines, des amours et des faiblesses. Elle parlait poliment à tous mais avec parcimonie, elle restait économe de ses pensées et cultivait la discrétion. D’elle, on vantait la fidélité à mon père et l’ardeur au travail. Mais de ses fils, on parlait peu, l’un mort, l’autre étranger. De quoi alimenter bien des mystères et justifier toutes les malédictions. Elle n’avait ni amie ni ennemie. Aussi, toutes les femmes sans exception se relayèrent-elles la nuit à son chevet, revivant entre deux prières ces brèves histoires qui avaient ponctué la monotonie de leur vie. Tous ceux du village furent présents pour former le cortège. Pas un ne manqua, ce qui au pays reste exceptionnel. Les haines se cultivent et se transmettent comme la terre, et chacun profite du moindre événement pour en réveiller la mémoire. Même son beau-frère, le frère de mon père à qui nous n’adressions plus la parole depuis plus de vingt ans, depuis qu’il s’était emparé de nos deux meilleurs champs lors du remembrement, même lui, suivit le cercueil, derrière, avec les chiens, jusqu’à la mise en terre. »

Cruelles retrouvailles

Denis Labayle
Éditions Julliard (2002)
202 pages.
18,10 euros

Prix du roman du Doubs 2002
Prix Littré 2003
Mention spéciale du jury au Prix du Télégramme de Brest 2003
Sélectionné pour le prix Synopsis 2003

 

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Présentation du roman

par Yolande Bastian, de la bibliothèque de Sarrebourg,
paru dans Page, le journal des libraires :

« Entre le rythme effréné de la journée et ses errances nocturnes et solitaires, un médecin de banlieue parvient à trouver un fragile équilibre. Les blessures d’enfance semblent cicatrisées… lorsque soudain surgit, de ce silence opaque, Yann Pennec, curieux compagnon du passé : il est fascinant, manipulateur, pervers. Renaît alors une relation ambiguë faite d’admiration et de crainte, de malaise et de mensonges, de sourires et de morsures. Cependant, les forces se sont inversées : Joseph est désormais médecin, et c’est Yann le malade…
Peinture sociologique d’une banlieue populaire colorée, savoureuse et attachante, évocation d’une douloureuse ascension sociale et du combat d’un homme contre ses démons et ses angoisses, ce roman généreux est très agréable à lire. Le ton juste, le style classique, les mots riches et subtils. » Continuer la lecture de « Cruelles retrouvailles »

Tempête sur l’hôpital

Denis Labayle
Editions Le Seuil (2002),
276 pages
17, 50 euros.

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Présentation du livre

Denis Labayle ne se contente pas de dénoncer l’incohérence de l’institution, il explique pourquoi on en est arrivé là et évoque les risques pour l’avenir. Il entraîne le lecteur au-delà des services de soins, dans les coulisses de l’hôpital à la rencontre de ceux qui le dirigent et des mystérieux maîtres-fantômes qui décident à distance de son avenir. Plus on s’éloigne des soins, plus on se rapproche des décideurs.
Fondé sur l’expérience et sur la recherche, son livre décrit une réalité vivante grâce à des témoignages et de nombreuses anecdotes comme seuls peuvent en rapporter les hommes de terrain. Continuer la lecture de « Tempête sur l’hôpital »

Microbes du bien, microbes du mal

Le Monde, 2 octobre 2001

« Rennes en quarantaine… », « vingt-cinq foyers de variole déclarés à ce jour… », « Premiers cas d’anthrax diagnostiqués chez 350 passagers d’un Boeing 747 en provenance de Karachi… », « L’aéroport de Roissy, zone interdite, zone contaminée… ». On peut facilement imaginé les gros titres de la presse si le bioterrorisme se manifestait. Pure fiction ? Fantasme médiatique pour donner des frissons aux nantis ? Continuer la lecture de « Microbes du bien, microbes du mal »

La France de l’audace

Denis Labayle
Les initiatives qui changent la société
Préface d’Albert Jacquard
Éditions Seuil

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PRESSE

Parce qu’il est allé « rôder du côté du meilleur », Denis Labayle nous révèle une France de l’audace et de l’imagination où les initiatives fourmillent, où les hommes et les femmes cherchent, innovent et trouvent des solutions concrètes à des problèmes réputés insolubles.
Étudiants qui pratiquent le tutorat bénévole, banques qui mettent sur pieds des prêts et des placements-partage, chefs d’entreprise précurseurs de la réduction du temps de travail, réseaux d’échanges réciproques de savoirs, créateurs d’emplois d’insertion, collectivités religieuses qui inventent un indice boursier éthique, médiateurs de la nuit dans les banlieues, on pourrait multiplier les exemples sans épuiser le richesse de cette révolution silencieuse. Continuer la lecture de « La France de l’audace »

La vie devant nous

Denis Labayle
Éditions Le Seuil, 1999
242 pages
17 euros

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Présentation du livre

En 2005, un français sur cinq avait plus de soixante ans, cinq millions plus de soixante-quinze ans et deux millions ont perdu leur autonomie. Ces chiffres, notre société préfère les oublier comme elle a souvent oublié les conditions dans lesquelles meurent nos aînés. Un jour ou l’autre chacun se trouve confronter au problème de rechercher un établissement spécialisé pour un parent ou pour soi-même.
Pour ce livre, paru en 1995, Denis Labayle a enquêté pendant plus de trois ans sur les institutions accueillant des personnes âgées. Il ne s’est pas contenté d’évoquer les drames et les scandales, sans discrimination entre le secteur privé et le secteur public, il est allé à la rencontre de ceux qui explorent l’avenir. Continuer la lecture de « La vie devant nous »

Vieillesse et précarité : une bombe à retardement.

Libération 8 septembre 1998

Les démunis âgés sont nombreux, et le silence du monde politique assourdissant.

L’assemblée nationale a adopté à l’unanimité, le 14 janvier, une proposition de loi en faveur des chômeurs de plus de 60 ans. Le projet doit permettre à quelques milliers de chômeurs ayant cotisé pendant quarante ans de partir à la retraite avant l’âge fatidique. Continuer la lecture de « Vieillesse et précarité : une bombe à retardement. »

Plaidoyer pour une infirmière

Le Monde 30 juillet 1998

Nul ne connaît, pour l’instant, les conditions exactes dans lesquelles ont eu lieu les faits reprochés à Christine Malèvre, l’infirmière de l’hôpital François-Quesnay de Mantes-la-Jolie (Yvelines), mise en examen pour avoir « mis volontairement fin aux souffrances de ses patients. » Un substitut de Versailles a toutefois reconnu qu’elle n’avait agi « ni pour l’argent, ni par intérêt, ni à la demande d’une quelconque association ». Continuer la lecture de « Plaidoyer pour une infirmière »